mardi 30 octobre 2007

Du cerveau au petit embryon

Intéressant article dans le dernier "Developmental Biology" (Kawamura et al. Dev Biol 311, pp147-158 (2007)) qui montre qu'une molécule de signalisation intercellulaire qu'on croyait jusqu'alors cantonnée au développement des neurones, BDNF (ou Brain Derived Neurotrophic Factor), a aussi un rôle dans le développement des blastocystes de souris, c'est-à-dire des jeunes embryons qui sont encore très loin d'avoir un cerveau et des neurones. Le ligand BDNF et son récepteur appellé TrkB sont exprimés dans les cellules du trophectoderme, c'est-à-dire les cellules qui forment la sphère qui délimite le blastocyste à ce stade. De plus, BDNF est aussi exprimé par les voies génitales maternelles, ouvrant la possibilité d'une communication paracrine mère-blastocyste à ce stade. La signalisation BDNF est importante pour la survie des cellules du blastocyste et l'inhibition de l'apoptose (le suicide cellulaire).
Ce n'est pas la première fois qu'on retrouve des voies de signalisation classiques de cellules différenciées "reprises" pour des cellules embryonnaires. Par exemple, l'endothéline et ses récepteurs qui ont un rôle dans le contrôle de la contraction des vaisseaux sanguins ont aussi un rôle dans la migration de cellules dans l'embryon, une fonction qui n'a rien à voir avec la précédente et à un autre stade du développement. Voila comment on fait de grandes choses avec un nombre de gènes qui n'est pas si grand que ça : on recycle sans arrêt les mêmes molécules !

mardi 23 octobre 2007

Le nouveau tube de Jason Malachi...

Situation très bizarre sur le Net avec une chanson inédite composée et chantée par un certain Jason Malachi...Mais à écouter de plus près (voir par exemple ce site), on sent bien que le véritable compositeur-chanteur est un quasi anagramme du nom précédent. Alors soit c'est un fake (un faux) mais alors sacrément réussi ou alors est-ce une vraie chanson inédite de Michael Jackson. Je penche nettement pour la deuxième solution, tellement ça colle avec le style, l'intonation, le timbre. Par exemple, toute la partie comprise entre 1min40 et 2min, c'est du Michael pur jus sans additif ni conservateur. Question subsidiaire : est-ce une chanson non sélectionnée pour le dernier album paru (Invincible) ou est-ce que c'est une chanson du futur album?

samedi 20 octobre 2007

Pas du tout élémentaire, mon cher Watson

L'un des découvreurs de la structure en double hélice de l'ADN, James Watson, s'est laissé aller à des propos qui ont choqué toute la communauté scientifique et au-delà (voir l'article du Monde). Il a été licencié de l'Institut Cold Spring Harbor qui l'employait (encore, malgré son age (79 ans)...).
Watson a déclaré qu'il aurait aimé que tout le monde soit égal, mais que "ceux qui ont à traiter avec des employés noirs savent que ce n'est pas vrai". "Nos politiques sociales se fondent sur le fait que leur intelligence est la même que la nôtre (Occidentaux blancs), alors (...) que toutes les recherches concluent que ce n'est pas vraiment le cas".
Ces déclarations font d'ailleurs suite à diverses autres déclarations fracassantes sur les gènes de l'homosexualité et le lien supposé entre pulsions sexuelles et couleurs de peau (je vous laisse imaginer le gros préjugé...).
Le problème n'est pas tant que ces propos sont choquants (quelquefois la vérité peut choquer...), que le fait qu'ils sont faux. Watson, obnubilé sans doute par sa découverte majeure sur l'ADN et la génétique, surestime l'impact de l'inné (génétique) et sous-estime l'influence de l'acquis. Il est évident que le contexte familial, la présence plus ou moins forte d'une religion abrutissante et infantilisante, l'accès à l'éducation scientifique...va influer massivement sur les capacités cognitives logiques d'un individu. Le danger avec Watson, c'est que ses propos vont être repris par ce que j'appelle les partisans des "petites cases" (ceux qui aiment classer les gens dès leur naissance avec tous les préjugés possibles) avec le label "Un Nobélisé l'a dit c'est que ça doit être vrai". Je rappelle donc que les Nobélisés ont un cerveau qui dégénère comme tout le monde avec l'âge et que ce n'est pas parcequ'on a été doué un jour en génétique et en biochimie que l'on peut échapper à une éducation raciste et xénophobe très répandue à l'époque où Watson a développé ses propres facultés cognitives.

lundi 15 octobre 2007

Affichage du deuxième type

Saluons une intéressante initiative de la SNCF (je ne parle pas de la grève de jeudi qui est une très mauvaise initiative rien que par la quantité massive de CO2 supplémentaire que cela fera rejeter dans l'atmosphère). Les tableaux d'affichage classiques des trains indiquent les différents trains par ordre chronologique. Si cela peut être satisfaisant pour les grandes lignes où en général on réserve et donc on sait l'heure de départ de son train, cela ne l'est plus pour les voyages régionaux ou les trains de banlieue où on cherche plutot à atteindre une destination sans connaitre l'heure du départ. Voila donc logiquement installé à la gare Saint-Lazare qui est la première gare de Paris pour le trafic banlieue un nouveau tableau d'affichage où les trains sont classés par ordre alphabétique de destination avec ensuite l'heure de départ, le quai et la durée du trajet pour les 2 prochains trains s'arrêtant à cette gare. C'est intéressant notamment pour repérer les dépassements de trains par exemple le train de 16h12 pour Mantes La Jolie y sera en 1h18 alors que celui partant à 16h30 y sera en 55 minutes, donc 5 minutes plus tot que celui qui partait avant !!

vendredi 12 octobre 2007

Les magiciens d'"Oz"

J'ai découvert récemment une série américaine en DVD qui s'appelle "Oz". Rien à voir avec un univers féérique puisque c'est le diminutif de Oswald Penitentiary Institution, une prison américaine où sont envoyés les prisonniers les plus durs. Au sein de cet établissement, le surveillant en chef (Tim McManus) tente une expérience : recréer une "ville" dans la prison où les prisonniers pourraient réapprendre à vivre en société. Il est clair que ce ne sera pas de tout repos. C'est violent, cruel, très politiquement incorrect mais brillant, excellentissimement joué et remarquablement bien écrit (cf. quelques extraits de dialogue plus bas extrait du site imdb). La population carcérale est divisée en clans : les Nazis (les blancs racistes), les Noirs junkies, les Noirs musulmans, les mafieux (italiens) et les Irlandais, sans oublier le clan des surveillants de prison dont les moeurs et habitudes sont quelquefois difficilement distinguables de ceux des prisonniers....L'histoire de chaque épisode est commenté par l'un des prisonniers, Augustus Hill, handicapé à la suite de brutalités policières, de manière particulièrement percutante, ironique ou absurde (un type d'expression très rare dans les séries américaines...). La série se positionne très clairement contre la peine de mort. Il y a aussi de très bons moments comiques notamment la scène inoubliable du dentiste de la prison qui doit retirer une dent à un prisonnier qui a mangé ses victimes.

Leo Glynn: Hey, Tim, want to grab some dinner?
Tim McManus: Appreciate it, Leo. I can't.
Leo Glynn: Too much work to do, right? You can take a break from saving the world. Even Jesus had supper. Tim McManus: Yeah, and right afterwards he was betrayed and crucified.
Leo Glynn: I'll try not to take that personally.

Donald Groves: [gives Alvarez a stamp] Here.
Miguel Alvarez: I don't wanna write anybody a fucking letter. I wanna get fucking high.
Donald Groves: You lick the back. It's liquid LSD.
Miguel Alvarez: Groves, this gives stamp collecting a whole new meaning, baby

Vernon Schillinger: So the state's gonna let Keane choose which way he's gonna go out. Me, I'd take hanging.
Mark Mack: What about lethal injection?
Vernon Schillinger: That's for pussies.
Donald Groves: They say that lethal injection causes no pain. How do they know? Did someone come back from the dead and say they didn't feel anything?


Tim McManus
: You say you've changed. Why should I believe you?
Vern Schillinger: Trust me, McManus, you lose an eye, you get kicked in the balls, you get a face full of shit, you become a different man.

Beecher: You've got to transfer me to another cell block.
Tim McManus: All the other cell blocks are full.
Beecher: Well transfer me to another prison.
Tim McManus: Do I look like a travel agent to you?

Leo Glynn: People, we've got three murders in two weeks. I got the Commissioner yelling in my ear and the press shoved up my ass. The Governor's threatening to send in the feds. And my daughter wants to move into an apartment with her boyfriend. Somebody, help me out here.


Vernon Schillinger: You're not a Jew, are you?
Tobias Beecher: Me? Jewish? I don't even like Barbra Streisand.


Augustus Hill: Do we care for people when they're sick because we actually care about them? Or do we care for them because when our time comes, we want someone to care for us? Or does it matter? At least you got your health. Don't you hate it when people say that? I mean, you lose your job, you lose your wife, you're in prison, and some punkass dude gonna say, "At least you got your health." Like that's supposed to make me feel better. So what if I'm broke? So what if some drug dealer wants to cap my ass? At least I ain't got a tumor. I swear, the next person that says ALYGYH to me, I'm gonna make sure they ain't got their health much longer.

mardi 9 octobre 2007

Des Nobels qui ont échoué...

Le prix Nobel de médecine vient d'être attribué à deux américains (c'est un pléonasme) et à un anglais pour leurs travaux vieux de 20 ans qui ont permis la mise au point de la technique dite du "knock-out" (KO). Il s'agit de comprendre la fonction d'un gène en le détruisant (on n'est pas forcément très subtil en biologie moléculaire...) ou mieux en le remplaçant par un autre gène (ça s'appelle très finement le knock-in) chez la souris. Nos Nobels ont découvert que pour réussir cela il fallait réaliser la mutation dans les fameuses cellules embryonnaires souches (cellules ES). La souris est suffisamment proche de l'homme (tout est relatif...mais nous raisonnons par rapport aux autres modèles classiques : levure, drosophile, xénope...) pour espérer modéliser des maladies génétiques humaines chez des souris. Le plus drôle dans l'histoire c'est que nos Nobélisés ont en fait commencé par échouer dans la modélisation d'une maladie.

Le premier KO réalisé par Martin Evans publié
en 1987 dans Nature consistait en une tentative de modélisation du
syndrome de Lesch-Nyhan (troubles neurologiques et comportementaux
(auto-mutilations) dus à l'accumulation d'acide urique) qui est
associé chez l'homme à des mutations dans HPRT (hypoxanthine-guanosine
phosphoribosyl transferase, une enzyme impliquée dans le recyclage des
bases puriques (des constituants de l'ADN). Et les souris KO obtenus, bien que ne produisant pas de HPRT,...n'ont pas présenté de phénotype (de maladie) !! C'est que les voies de
biosynthèse impliquées sont différentes entre l'homme et la souris.
C'est donc assez amusant de voir que dès le premier KO, les chercheurs
sont tombés sur le principal défaut de cette approche pour modéliser
des pathologies humaines... Mais en vingt ans bien d'autres KO ont été générés pour environ la moitié des gènes de la souris et ont amené une quantité d'informations incroyables dans tous els domaines de la biologie.

Par ailleurs, signalons que l'un des Nobélisés pour la Physique est Normalien et travaille à Orsay. J'aime bien son parcours...

mercredi 3 octobre 2007

La plante, la larve et le taxonomiste


Voila une jolie histoire qui pourrait être une fable :
Tous les taxonomistes (les chercheurs qui classent les organismes vivants) pensaient que les Brunfelsia (espèces de buissons et d'arbustes sud-américains) étaient des végétaux de la famille des Scrophulariacées. Cette plante est parasitée par les larves de Thyridia (un Lépidoptère, famille du papillon). Or toutes les autres plantes mangées par les larves de Thyridia sont des Solanacées (la famille de la tomate et de la pomme de terre), ce qui amena à une meilleure observation des structures de Brunfelsia et...à son déplacement vers le groupe des Solanacées. Merci donc les larves de Thyridia qui n'ont pas une connaissance plus fine de la taxonomie végétale mais qui sont très sensibles à des métabolites secondaires qui constituent la signature chimique de chaque groupe de végétaux.